1999 Marie-Christine Blanc
Il y a des hommes anthropomorphiques et des souches d’arbres qui prennent figure de mains, de jambes, de visages. La rencontre se fait a la surface d’un papier au crayon, feutre, et aquarelle.
Le travail de Georges Romathier est agissant, huiles et tempera se succèdent. Les formats évoluent au fil des techniques : petits, discrets, intimes.
La respiration change, les tableaux s’imposent plus sombres, construits et organisés dans un équilibre sans tension, notre corps se déplace. Le regard chemine l’œuvre et le paysage. Georges Romathier participe à cette tradition thématique, historiquement abordée. Son approche en est abstraite ; la modernité révélée s’articule dans le passage du corporel au monde végétal.
Les seins, les jambes, les courbes féminines esquissées dansent librement, invitent au bien-être, au plaisir, à la sensualité éprouvée sous le soleil tempéré d’abri naturel. Apparaissent aussi des zones d’ombres qui valsent et s’affirment dans le lavis. Le contraste est intense. Le support léger du papier reçoit l’énergie du mouvement, renforcé par le choix du médium.
Dans un combat silencieux entre rythme et immobilité, l’acte est maîtrisé. L’isolement de l’être humain et de la touche s’évanouit en se rencontrant. La gamme chromatique varie : des roses orangés (coucheur de la chair) aux bleus-verts et bruns où l’homme s’enracine. La gestuelle de Georges Romathier est libre, non préméditée, sans dévier pour autant vers l’aléacoire. Son coup de pinceau est une signature irréversible. Une complète fluidité traduit le souffle du changement proche de la calligraphie chinoise, le temps s’écoule tranquillement, le changement de saisons s’exprime plastiquement en un ballet coloré ou la matière est légère, transparente, à deviner.
L’abstraction des années 60 allait recomposer l’environnement, en s’appropriant cette perception du monde. Georges Romathier crée une écriture tourbillonnaire aux rythmes remuants, rapides; l’élément fragmentaire pivote sur lui-même et provoque une sensation visuelle d’englobement. L’observation sur le motif, la contemplation non mystique mais traversée par l’émotion, rendent le travail profond, harmonieux et paisible.
Les œuvres de Georges Romathier sont des jardins naturels. La main de l’artiste y caresse chaque élément pour les apprivoiser sans jamais les enfermer.
La fusion, espace-matière, lumière, est aboutie.